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.— Oui, acquiesçai-je, tout content, en braillant un couplet gaillard, deux fois plus fort que les précédents.— Changeons de place, ça te clouera le bec.— Je ne sais pas manœuvrer un voilier.— Je vais t'apprendre.Et, brusquement, le fameux sourire.Nous permutâmes donc, maladroitement, et Finn me tendit un bout et la gouverne.— Essaie de sentir la façon de les équilibrer l'un par rapport à l'autre, me recommanda Finn.De l'hébreu pour moi.Au début, je luttai de toutes mes forces contre le vent et les vagues.Sans résultat.Le canot progressait par soubresauts, telle une vieille voiture cahotant, faute d'avoir enclenché la bonne vitesse, s'arrêtant, repartant, oscillant dangereusement à droite et à gauche.Finn fixait l'horizon, détendu, un petit sourire aux lèvres, refusant de m'aider.J'allais abandonner quand, soudain, l'embarcation fila droit devant en une course fluide et ordonnée.Nous voguions ! Je voguais ! Le petit bateau fonçait, planait, la mer frappant l'avant de la coque, le vent à tribord, la voile tendue comme un trampoline.La vitesse et une vague terreur me rendirent téméraire, enthousiaste, durant les trois minutes qu'il me fallut pour amener l'embarcation trop près du vent et que je perde prise sur la barre.Ma communion avec les éléments cessa net.Le mouvement expédia le gouvernail dans le coin opposé de la poupe, hors de portée de main.Je m'accrochai comme un naufragé au cordage de la voile, le canot gîtant de manière impressionnante, de plus en plus rapide, et prenant l'eau sur le bord.— Lâche la voile ! me hurla Finn.Malheureusement, tétanisé, les yeux à moitié fermés, je priais pour mon salut, les doigts agrippés autour du bout avec une obstination paralysée.Finn dut me l'arracher de force, et l'effet magique se produisit - le bateau se redressa instantanément.La barre, soudain libre et amicale, vint se placer dans sa main et, après quelques réglages, nous reprîmes notre course.D'un geste, Finn m'indiqua de retourner à la proue.Il était triomphant, ce qui ne lui ressemblait pas.Si je ne l'avais pas aussi bien connu, j'aurais pu le soupçonner d'avoir voulu prouver quelque chose, comme la minceur de la frontière qui séparait une navigation déliée et efficace du chaos, de la panique, de la mort.Mais bon, peut-être pas.Essayer de penser comme Finn revenait à se rendre coupable de ce que notre professeur de littérature appelait un « misérable sophisme » - attribuer des émotions humaines à un rocher ou à un arbre, par exemple.Finn songeait sûrement à la frontière pas si mince séparant qui était capable de diriger un voilier de qui ne l'était pas.Pour autant, je ne lui en voulus pas.Jouer le ballast me convenait parfaitement.Le vent avait forci, et je me penchai par-dessus bord, hypnotisé par les reflets du soleil sur la surface sombre de la mer et par l'opacité vert-noir de cette dernière qui défilait sous la coque.Nous longions la côte, en direction du nord, depuis moins d'une heure, et j'avais déjà oublié le but de notre croisière.— Regarde ! me dit Finn en désignant du doigt une anse peu profonde cernée par des falaises qui s'écroulaient, vastes pans de craie et d'argile ayant glissé vers la plage.— C'est là que se trouvait le port.Je me tournai, plissai les paupières afin de mieux voir, cependant que Finn bifurquait pour gagner le large.Nous étions à environ trois cents mètres du littoral quand j'aperçus quelque chose devant nous, une masse sombre qui affleurait à la surface.Je la montrai à Finn, mais il s'y dirigeait déjà.Peu à peu, je me rendis compte qu'il s'agissait d'un ouvrage réalisé de la main de l'homme.Le temps que je l'identifie comme le fort, la mer s'efforçait de nous réduire en miettes contre ses parois.Finn manœuvra habilement, contournant les remparts comme si c'étaient les bornes d'une régate, mouvement d'une audace folle, me sembla-t-il, car d'autres ruines romaines risquaient de nous éperonner.Bien que cela sonne comme un abominable cliché, la vision floue de cette construction vieille de deux mille ans fit se dresser les poils sur ma nuque.En bon élève romantique, j'imagine que je m'étais attendu à un édifice impeccable : murs gris légers formant des crénelages ordonnés comme un château fort en plastique.La réalité était cependant lourde et noire, semblable à une fantaisie cauchemardesque, couverte de berniques et d'algues, si profondément engloutie qu'on n'en distinguait presque rien, à l'exception des moments où les vagues fendaient la surface, et où la lumière tombait selon un certain angle.Mes rêves de jeter une corde par-dessus une tour et de quitter le bateau pour partir en exploration étaient lisibles ; le fracas dangereux des flots contre ces murs massifs les rendaient absurdes.Les seules formes de vie s'accrochant dans les parages étaient les bernacles et les moules.Finn nous ayant éloignés à une distance plus raisonnable, nous dérivâmes, voile affalée, songeurs.Il inclina la tête et me regarda, des éclats de soleil dans les yeux.Les coins de sa bouche se retroussèrent, et je crois bien qu'il se serait allongé, bras en croix, si cela avait été possible.— Eh bien, lâcha-t-il, le voilà, ton fort.En effet.Je scrutai les eaux, cherchant une trace quelconque du monastère de saint Oswald, le moindre vestige d'un cloître ou d'arches perchés sur ce Léviathan.Mais, si ces choses avaient existé, il n'en restait plus rien.— Et maintenant ? demanda Finn en haussant les épaules.Ce matin-là dans la cabane, en sécurité dans mon litdouillet, je m'étais imaginé glissant le long du flanc du canot, plongeant, tâtonnant le long des pierres lisses, retenant miraculeusement mon souffle jusqu'à ce que j'arrive au fond, où reposaient une couronne et un gobelet d'or, brillant dans la mer illuminée de soleil, attendant que je les ramasse pour les donner à Finn.Je m'étais vu émergeant, recrachant de l'eau comme une baleine et jetant d'un geste décontracté ces trésors inestimables dans le bateau, en guise d'offrandes.À présent, seule l'envie de mourir aurait pu me pousser à sauter.Sans nuages pour assourdir le vent, la mer volait autour de nous, écrasant ses vagues sur les ruines avec de violents bruits creux.Il était difficile de croire que ces remparts résistaient encore au poids de ces flots froids et sombres.Minute après minute, heure après heure, jour après jour, pendant plus de mille ans, les eaux s'étaient ruées à l'assaut de la maçonnerie ; je m'émerveillais que les Romains eussent été capables de bâtir des murs aussi résistants [ Pobierz całość w formacie PDF ]
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