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.Au même moment, Januel se redressait péniblement.Il n’aurait su l’expliquer, mais l’âme du Phénix s’était soudain apaisée dans son esprit comme si elle avait trouvé prétexte à l’épargner.Ce répit lui permit de découvrir l’ampleur des dégâts.Une odeur atroce de chair brûlée agressa ses narines.Ses yeux embués par la chaleur dégagée par le corps du Féal avaient peine à s’y accommoder.Les convives avaient déserté la grande table impériale et bataillaient autour de la tour pour s’y frayer un passage.Un lion gémissait auprès du cadavre du chevalier qui achevait de se consumer, tandis que Sen’Den, battant des ailes, s’interposait entre le Phénix, effroyable, démesuré, et l’empereur entouré de sa garde.Maître Farel gisait sur le sol en grimaçant de douleur.Ses immenses ailes déployées, le Phénix détendit soudain le cou et sa gueule transperça le corps de Sen’Den de part en part.Le prêtre hurla et s’enflamma comme une torche.Lorsque ses ailes prirent feu à leur tour, il plongea vers le sol et s’écrasa devant le trône.Le visage brûlé par la fournaise en lévitation au-dessus de lui, Januel s’efforçait de réfléchir à la vitesse de l’éclair.Il tremblait de tous ses membres et sa poitrine n’était plus qu’un brasier sous sa robe en lambeaux.Chaque respiration manquait de le faire hurler de douleur.Les poings serrés, il devait faire appel à toute sa force physique pour ne pas s’écrouler au sol.Januel comprit que le Phénix allait s’en prendre à l’empereur.Le faisait-il volontairement ou s’attaquait-il spontanément à celui qui, accompagné de ses chevaliers, représentait le plus grave danger ? Januel l’ignorait mais sentait qu’il ne lui restait qu’une seule chance de sauver à la fois le Féal et l’empereur.Cette ultime alternative le condamnerait à coup sûr mais sa vie n’importait plus.Il ne pourrait jamais rattraper son erreur, mais il jouissait d’un infime sursis pour accomplir une dernière tentative.Le simple fait de penser était un douloureux calvaire, pourtant l’action qui lui venait à l’esprit lui semblait juste.Son sacrifice prendrait un sens s’il lui permettait de soustraire le Phénix à l’influence du Fiel.D’autant que la mort de l’empereur précipiterait à nouveau l’Empire de Grif ’ dans le chaos et en ferait une proie facile pour la Charogne.Pour empêcher cela, Januel devait transformer son corps en réceptacle, devenir l’écrin du Féal.L’Embrasement était l’unique solution.Maître Farel certifiait qu’aucun phénicier n’était en mesure de survivre à l’Embrasement d’un Phénix des Origines.Pour autant, la mort ne signifierait pas son échec.Le Féal serait enfermé.Januel disparaîtrait mais son cœur, nourri par le Phénix bloqué à l’intérieur, survivrait et serait conservé par la guilde au même titre qu’une relique.Il lui fallait agir au plus vite.L’oiseau de feu se dressait désormais au-dessus du trône et battait lentement des ailes, les yeux braqués sur l’empereur et ses gardes.Campés sur leurs jambes, les dix chevaliers de l’Ordre du Lion défiaient le Féal en retenant leurs bêtes.Dominés par une peur ancestrale, les lions blancs tiraient sur leurs longes en poussant de terribles rugissements.Un étrange sentiment de sérénité s’empara de Januel, faisant voler les lourds rideaux du souvenir et de l’horreur.Il s’était toujours senti coupable d’avoir survécu à sa mère, de ne pas être tombé sous les lames perfides des assassins.Elle était morte et il était vivant.Il tenait enfin l’occasion de donner un sens à sa mort, d’être digne de disparaître pour retrouver sa mère dans l’au-delà.L’Asbeste affirmait que l’âme des justes rejoignait les vents, qu’elle devenait un souffle, libre de parcourir le M’Onde.Januel s’imaginait souvent que sa mère était devenue un murmure qui, parfois, se glissait dans ses rêves pour guider son existence.Cette pensée était pour lui une source claire à laquelle il s’abreuvait lorsqu’il doutait de l’avenir.Et, à cet instant précis, alors que le Phénix des Origines brillait au-dessus de l’empereur tel un soleil, il accepta pleinement l’idée de mourir.Il gardait un souvenir mêlé de joie et de souffrance des Embrasements qu’il avait accomplis à Sédénie.Ces expériences se révélaient extrêmement douloureuses au moment où le Phénix s’immisçait dans votre corps.Votre sang semblait littéralement se transformer en huile brûlante, tandis qu’il fallait résister à l’envie de s’arracher son propre cœur transformé en charbon ardent.Januel avait gardé le lit plusieurs jours à la suite de ces exercices, mais il en avait tiré une force nouvelle, le sentiment que rien ne pouvait se comparer à cette intimité entre un disciple et un Phénix…C’était maintenant ou jamais.Il plongea violemment les mains dans les Cendres et en saisit une poignée pour les élever à hauteur de son visage.Ce contact franc dénué de toute réserve constituait le préalable à l’Embrasement.Il signifiait au Phénix l’engagement absolu de son serviteur, sans espoir de renoncement.Januel sentit aussitôt l’âme du Phénix s’ébrouer dans son crâne et se déployer à nouveau pour envahir l’esprit de son accoucheur.Il s’affala sur le sol de marbre et porta les mains à ses tempes.Aucune métamorphose n’égalait ce message antique qui liait les phéniciers à leurs Phénix.Leurs deux esprits se fondirent dans le même creuset et Januel se mit à hurler.Le cri mourut sur ses lèvres lorsque le Fiel, galvanisé, crocha son âme.Il avait espéré que l’Embrasement consumerait le Fiel et étoufferait ses pulsions destructrices, il s’était trompé.Le Phénix prit de l’ampleur et, en un mouvement majestueux, referma ses ailes sur l’empereur et ses chevaliers.Le feu du Féal n’avait d’équivalent que la puissance destructrice de la lave.Le temps d’un battement de cils, les dix plus grands guerriers de l’Empire prirent conscience de leur propre mort.Les armures se changè-rent en métal en fusion, les épées se flétrirent comme des fleurs et les corps furent désintégrés.Lorsque l’empereur se vit perdu, son unique pensée fut pour la Charogne.Sa disparition sonnait le glas de la lutte entreprise en son nom contre les Charognards.Il mourut en silence, les deux mains vissées sur le pommeau de l’épée qui avait triomphé de tant d’ennemis.Januel ressentit la mort de l’empereur jusqu’au fond de son âme.Le Fiel la lui fit partager, en se délectant du supplice qu’elle inspirait au jeune disciple.Par sa faute, l’une des plus grandes figures du M’Onde venait de disparaître, sans gloire.Pourquoi ne disparaissait-il pas à son tour ? Pourquoi l’Embrasement ne l’avait-il pas encore terrassé ?Une sueur poisseuse coulait le long de son dos, de ses bras, de son visage mais, pour une raison inexplicable, il ne souffrait pas.Il ne souffrait plus.Au contraire, le Phénix semblait enfin reconnaître l’autorité du disciple.Le Fiel se tarissait.Peu à peu, l’oiseau de feu commença à se désagréger au vent glacé des montagnes de Gordoce [ Pobierz całość w formacie PDF ]
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