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.Si un joueur n’était assis devant sa machine que depuis un quart d’heure et qu’il touchait le gros lot c’est-à-dire si trois cerises s’affichaient sur son rouleau, il pouvait s’estimer heureux ; généralement, il ne récupérait qu’un cinquième de ses mises et encore en était-il ému, il criait, s’ébouriffait les cheveux et était regardé par ses voisins avec considération.— Un bon gain, dites donc ! Un bon gain ! Vous jouez depuis combien de temps ?— Six heures.J’y suis depuis sept heures du matin.J’ai avalé un petit-déjeuner sur le pouce pour pouvoir prendre cette machine-ci.Je savais qu’elle me porterait bonheur.J’y ai joué aussi hier soir, puis j’y ai rejoué un peu après dîner.Alors voilà, c’était mon tour, moi, je dis.Je suis heureux, je suis vraiment content.Il retirait ses lunettes, faisait avec les doigts le V de la victoire, posait le deuxième seau pour ramasser la fortune métallique que distillait bruyamment la machine, puis trempait sa moustache dans son verre de Bloody Mary.— Un Bloody Mary, mademoiselle ! demanda Démon.C’était une patineuse aux cheveux roux dont le visage, les bras, les mains et même la fraction de poitrine que montrait son décolleté étaient constellés de taches de rousseur.Elle regarda Démon de ses yeux d’un vert intense et dit d’un air désolé (elles étaient payées pour être aimables, douces, exquises) :— Désolé, vous devrez le commander au bar, je n’ai le droit de servir que les joueurs.C’était peut-être la seule bonne raison de jouer, se dit Démon.S’asseoir devant une machine, faire voir qu’on introduisait des pièces dans la fente, se risquer à perdre quatre ou cinq pièces de nickel et appeler la serveuse pour qu’elle constate qu’on était effectivement en train de jouer, qu’on était sans conteste un bon client et, après un, deux, trois Bloody Mary dans le nez, commencer à perdre le contrôle son porte-monnaie.Il résista à la tentation.Il prit l’ascenseur, pressa le bouton du dixième étage.Au premier, un groupe de Noirs chargés de bagages entra bruyamment dans la cabine et l’accula presque dans un coin.Il ne put s’empêcher d’être contrarié.Arrivé à son étage, il dut les frôler pour sortir et ne put dissimuler la répugnance que cela lui provoquait.Tout comme son père, il haïssait les Noirs.— Dieu les a créés pour nous servir et maintenant ils s’imaginent qu’on doit se mettre à leur botte.C’est à cause de ce fichu Kennedy, tout ça.15Il frissonna en entrant dans la chambre glacée.Les femmes de chambre avaient fait son lit et manipulé le thermostat de la climatisation.Il le remonta, il faisait trop froid à son goût.Il s’assit au bord du lit et alluma la télévision ; il zappa jusqu’à tomber sur un vieux film avec James Stewart : l’élancé lieutenant-colonel de l’armée de l’air tenait le rôle d’un petit vendeur dans une maroquinerie de Budapest.Il décrocha le téléphone et demanda le numéro de son client à Daggett.Il s’écoula un moment avant qu’on le mette en relation.Il y avait du grésillement sur la ligne, sans doute parce que ce matin-là il soufflait un vent violent.Tandis qu’il attendait, le combiné collé à l’oreille, il ne perdait pas une miette de ce qui se passait sur le petit écran.Il avait coupé le son, mais il pouvait deviner les dialogues en lisant sur les lèvres des acteurs.— Ici Douglas, qui est à l’appareil ?Il sursauta légèrement.Il ne s’attendait pas à ce que Douglas lui-même décroche chez lui.Il se racla la gorge pour trouver le ton approprié.— Monsieur Douglas, ici Démon, de chez Hubert and Hubert.S’ensuivit un silence.Je n’ai pas le plaisir de vous connaître, dit sèchement son interlocuteur à l’autre bout du fil.— Je crois que vous attendiez ma visite.C’est au sujet de la signature du contrat d’assurance.— Ah, oui, oui.Je vous attendais il y a quelques jours.N’avions-nous pas rendez-vous lundi dernier ?— Je vous présente mes plus plates excuses, monsieur Douglas.J’ai eu un contretemps.La climatisation de ma voiture est tombée en panne en plein désert du Nevada, j’ai dû l’amener au garage.— Ah bon.— Dès qu’elle sera réparée, je me rendrai chez vous pour que nous discutions de notre affaire.Votre contrat est arrivé à expiration, mais je suppose que vous souhaitez le renouveler.Nous tâcherons de conserver vos conditions avantageuses.— Je ne sais pas si je serai là, dit M.Douglas après une pause.— Vous devez vous absenter ?— J’ai pas mal de choses à faire, je suis un homme très occupé.Vous avez raté notre rendez-vous, je ne peux pas passer mon temps à vous attendre, dit-il, manifestement agacé.— Comme je vous le disais, j’ai eu un empêchement, un cas de force majeure.J’espère pouvoir passer chez vous d’ici quelques jours au plus tard.— Vous ne m’avez pas appelé pour me prévenir.Il avait raison.Bon sang, il ne l’avait pas appelé !Il était trop préoccupé par sa maudite voiture, cela lui était totalement sorti de l’esprit, s’était évaporé sous le coup de la chaleur, il avait été pris de panique en se retrouvant à Las Vegas.Mais il ne pouvait brandir aucune de ces excuses.— J’ai perdu la notion du temps, monsieur Douglas.Je suis impardonnable…— Passez-moi un coup de fil avant de venir, je ne voudrais pas que vous vous déplaciez pour rien.— Ne vous en faites pas, monsieur Douglas.Je suis relativement près de chez vous.— Où vous trouvez-vous en ce moment ?__ A Las Vegas._Humm.Cela fait des années que je n’ai pas mis les pieds dans cette maudite ville.__Personnellement, je n’y étais jamais venu, et je n’y serais sans doute jamais venu n’était ce contretemps.__Bon, soit, je vous attends, monsieur…_Démon.Mike Démon._Enchanté.Je vous dis donc à bientôt.Après avoir raccroché il respira, soulagé.Il décrocha à nouveau le téléphone et demanda un numéro à Tijuana.Personne ne répondit.16Il la regarda traverser la pièce pour aller se laver dans le bidet de la salle de bains, nue comme un ver, puis revenir, divine silhouette ! Elle ne sentait plus le sexe ni la sueur produite par leurs deux corps au cours de leurs ébats amoureux, ni le parfum dont il l’avait enveloppée en l’entourant de ses bras.Elle reprenait possession de son corps après que celui-ci eut été à lui quelques instants plus tôt.Il s’abstint d’allumer la lumière car il savait qu’au fond la fille était timide et qu’il lui déplaisait de se montrer nue après avoir fini de faire l’amour, elle détestait qu’on la regarde quand elle s’habillait ou se déshabillait [ Pobierz całość w formacie PDF ]
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